vendredi 31 août 2007

LA DEVOTION MARIALE AU DIOCESE D'INONGO


0.0. INTRODUCTION

Comme un récit de voyage à raconter, qu'il me soit permis de relater ici une impression que je considère à mon sens positive pour le bien que cela m'a fait tout au fond de moi-même.En effet, dernièrement, lors de mon bref séjour à Kutu, du 24 au 26 Août de cette même année 2007, je fus nettement impressionné, -image pourtant déjà vue-, par la présentation actuelle de la grotte de la Paroisse de Kutu, "Marie Reine". En fait de nouveauté, il s'agit simplement de son réaménagement sinon sa modification opérée par les missionnaires de C.I.C.M avant leur départ. Plus précisément, il s'agirait de l'intuition du Comité restreint du Conseil paroissial de Kutu, composé du Curé Père Yan Vandoren, de ses deux vicaires James et Vincent, tous deux, jeunes missionnaires au Congo et originaires des Iles Philippines, de la Mère Jackie Bolinga, de la Demoiselle Nzali Mélanie et de deux Assistants pastoraux Basile Mpot’Iyolo et Charles Mavuba. Le Comité restreint, en effet, - par quelque inspiration -, il nous faudra dire les choses ainsi-, décida de changer la façade de devant de la grotte qui, initialement regardait du côté de l’Hôpital de référence Bondo de Kutu, et par le fait même, semblait quelque peu, comme, "(dé)posée" tout au bord de la route. Rien à faire, l'architecte d'alors ne pouvait pas s'imaginer qu'il avait par là même livré le culte marial à l'indifférence des passants, à la dérision, à la sécularisation sinon la non-croyance des temps actuels, et quelque fois, - pourquoi pas -, à des actes certains de profanation. Sans doute que depuis toujours, on avait acquis l'habitude d'y aller prier sans problème. Mais il était plus que temps de voir la réalité autrement. Le Comité paroissial avait fini par lever une nouvelle option pastorale.

01. UNE INTUITION QUI FRAPPE

C'est sans effort qu'on est si tôt frappé par la place réservée désormais à Kutu à la Mère de Dieu. Dans la grotte qui ressemble à la mitre qui coiffe les prélats lors de cérémonies solennelles, la statue de la Vierge Marie regarde désormais, du côté de la cours intérieure de la Paroisse, dans un coin rendu idéal, par le fait même ainsi, pour favoriser un climat de prière et de recueillement. L'espace ainsi réaménagé offre, bien plus qu'avant, cette possibilité de se tenir, sans peur d'être dérangé par des va-et-vient intempestifs des passants, des bicyclettes ou des engins. On y a vu également des sièges en bloc de ciment placés en demi-cercles pour favoriser aussi bien des dévotions individuelles que des prières en groupe. Actuellement, la "Confrérie du Saint Rosaire" investit chaque jour l'endroit, avant le crépuscule pour réciter le Rosaire. Ce groupe de dévotion est accompagné par le Curé de la paroisse, Mr l'Abbé Ignace Ngara.La beauté et la simplicité de ce petit sanctuaire deviennent comme le centre des activités pastorales en même temps que le point de départ tout à fait obligé de nouvelles initiatives pastorales: telles la prise en charge matérielle de l'Eglise par ses propres fidèles, la "louange quotidienne et sans cesse" à Dieu, l'"offrande quotidienne" de nos intentions de prière. Bref, il naît à la Paroisse de Kutu une ère nouvelle qui est celle de l'"Apostolat de la prière", un aspect non moins important de la vie de l'Eglise mais très souvent laissé à la sphère du privé. Il nous faut bien reconnaître, en ce sens, que nous Catholiques avions perdu la dimension communautaire des 'oeuvres de la foi'. Une telle initiative pastorale devient, somme toute, tout un symbole, symbole d'une vie ecclésiale qui se met à l'écoute de ce que" l'Esprit dit aux Eglises", et par le fait même, redécouvre ses centres d'intérêt. Face à la gangrène que constitue actuellement l'attirance des sectes de la part de nos fidèles chrétiens, le culte marial et sa revalorisation viennent comme à point nommé. Le Rosaire, en effet, comme l'a su bien rappeler le Pape Jean-Paul II, est une "prière aimée des saints et encouragée par le Magistère" ( Cfr Lettre apostolique "Rosarium Virginis Mariae, n° 1 ). Cet édifice cultuel attire, sans coup férir, les regards, et plus fondamentalement, invite au recueillement auprès de Celle qui eut le mérite d'enfanter le Fils de Dieu. Mère de Dieu, Mère des hommes, Vierge sans pareil, Mère toujours Vierge, Mère du "Fiat", Mère du "Magnificat", Mère de la "divine contemplation", Mère "Debout près de la Croix", Notre Dame élevée au Ciel, "Porte du Ciel toujours ouverte", "Trône de la Sagesse", Notre Dame de l'"Immaculée Conception", Notre Dame Médiatrice des grâces, Notre Dame des douleurs, Etoile de la mer... , "Secours des mourants", "Arche d'Alliance", "Eve nouvelle", Mère infiniment céleste, infiniment terrestre, Mère infiniment tendre, infiniment humble, Mère infiniment présente, intimement discrète...

02. Réflexions théologiques sur la pratique
"Il n'y a pas de vie d'Eglise sans Théologie en activité". Ce point de vue que nous partageons pleinement avec Mgr T. Tshybangu dans son ouvrage "Théologie africaine", (P.7), ne laisse l'ombre d'aucun doute. Nos Eglises devraient plutôt prendre en considération le phénomène actuel de la "religiosité populaire" dans ses nombreuses manifestaions( Cfr Le Catéchisme de l'Eglise Catholique ) et donc, puissamment s'appuyer sur l'effort de réflexion critique sur nombre de pratiques pastorales qui, parfois loin de conduire le peuple de Dieu vers la "Vérité qui libère"(Jn 8, 6), l'en détourne à qui mieux mieux. C'est de cette même façon que le Pape Jean-Paul II recommandait aux Théologiens, dans sa Lettre apostolique "Rosarium Virginis Mariae", n° 43, de mener une réflexion à la fois rigoureuse et sage, enracinée dans la Parole de Dieu et attentive au vécu du peuple de Dieu, pour mieux découvrir les fondements bibliques, les richesses spirituelles et la valeur pastorale de cette prière traditionnelle. Comme on pourra bien s'en rendre compte, c'est dès les premiers moments de l'Eglise que la foi est chaque confrontée sinon, à de nouvelles situations socio-culturelles, mais du moins, et peut-être toujours, à des enseignements nouveaux, suscitant dans leur mouvance, de nouvelles pratiques et de multiples déviations. Hérésies et schismes ont ponctué l'histoire antique de l'Eglise. Les temps modernes comportent parfois leur relent d'hérésie ou de schisme, sans doute beaucoup moins virulent qu'au Moyen-Age. Toujours est-il que l'Eglise ne peut, sans faillir à sa mission, se donner du repos, face aux vrais enjeux de la foi chrétienne. Il est, par ailleurs, tout à fait indiquer que le Magistère de l'Eglise doit éclairer la Conscience chrétienne entre, d'une part, sur "ce que requiert l'Article de foi et ce que permet la dévotion", d'autre part. Ceci l'est davantage par rapport au foisonnement actuel des mouvements de dévotion mariale. A côté de la Légion de Marie, naissent au jour le jour d'autres formes de spiritualité mariale qui méritent un discernement en conséquence pour ne pas tomber dans le piège de condamnation massive, du relativisme ou du jugement prématuré. Notre réflexion s'enracine tout à bord dans la Bible.2.1. Bref aperçu des Ecritures Saintes/Marie dans les Ecritures L’inventaire des textes du N.T parlant de la Vierge Marie nous paraît bien plutôt sobre : un passage seulement dans toutes les 14 lettres apostoliques (Gal. 4, 4) ; une seule mention dans le livre des Actes (Ac 1, 14) ; deux allusions dans Saint Marc et ses parallèles (Mc 3,31-35 ; Mth 12,46-50 ; Lc 8,19-21. 11,27-28 ainsi que Mc 6,3-30). IL y a par contre une présence beaucoup plus accentuée de Marie dans les Evangiles de l’enfance (Mth 1-2 ; Lc 1-2). Chez Saint Matthieu, par exemple, la Vierge Marie est toujours citée tout à côté de son fils : « Ils virent l’enfant et Marie, sa mère »(2, 11) ; dans l’épisode de la fuite en Egypte, l’Ange s’adresse à Joseph en ces termes : «Lève-toi, prends l’enfant et sa mère » (2,13.14.19.21). Quant aux deux épisodes exclusifs à Saint Jean, aux noces de Cana, en Galilée et près de la Croix, la présence de la Vierge Marie aux côtés des « disciples » préfigure déjà l’Eglise.Comme on peut s’en rendre compte, les Ecritures Saintes, plus explicitement, le Nouveau Testament, accorde à la Vierge Marie une place de choix dans l'"Economie du Salut". Saint Paul l'exprime en ces termes:"Lorsque les temps furent accomplis, Dieu envoya son Fils, né de la femme" (Gal.4, 4). On voit Saint Paul associer Marie, de façon très étroite, au dessein salfivique de Dieu sur le monde et le temps. Il en est de du récit de l'annonciation dans les premières pages de l'Evangile chez les Synoptiques, Luc et Matthieu, surtout. La place centrale de la "Mère de Dieu" apparaît donc sans ambiguïté dans les Evangiles d'enfance (Mth 1-2 et Lc 1-2). Sur le plan du style même, on ne se fait pas de doute sur le lien qui est établi entre l'Ancien Testament et le Nouveau Testament. Marie y est vue comme la nouvelle "fille de Sion". Elle est invitée à l'allégresse et à la joie messianiques ( Cfr Lc 1, 5: "Rejouis-toi"//Soph. 3, 14; Zach. 2, 10). La trame des récits de l'annonciation à Marie ( Cfr Lc 1, 26-38) et à Joseph ( Cfr Mth 1, 18-25 ) nous rappellent l'Histoire du salut. Les récits en eux-mêmes constituent comme une relecture de celle-ci. Dans les Evangiles de l'enfance, l'enfant Jésus connaîtra à la fois l'exil et l'errance des patriarches et du peuple élu, les intrigues des princes de ce monde et leur folie de grandeur, le tumulte des Nations et de leurs princes dressés contre le projet de Dieu et Son Messie ( Cfr Ps 2, 1-2 ). Quant à Marie, nous dit Saint Luc, "elle gardait tous ces événements et les méditait dans son coeur" ( Cfr Lc 2, 19). les récits johanniques des noces de Cana (Jn 2,1-11) et de la passion (Jn 18, 25-27) spécifient encore davantage le rôle et la présence de Marie dans la vie et le ministère de Jésus. Partout la mention de la Vierge Marie comporte toute sa signification. Ce n'est jamais un fait divers ni un simple détail. Une lecture superficielle, donc à la "lettre", ouvre immanquablement à des interprétations fantaisistes. La Bible "lue en Eglise", c'est-à-dire, à travers la relecture qu'en font les Communautés chrétiennes dans leur vie de foi et pratiques quotidiennes, celle-ci se présente, à tout bien considérer, non plus comme un "Evangile fable" ni comme une "Ecriture plate", mais bien comme la "Parole de Dieu révélée" qui fait encore actualité...

02.2. Renouveau actuel du culte marial dans la Paroisse Marie Reine de Kutu

De la présentation actuelle de la grotte de la Paroisse de Kutu, c'est le culte marial qui paraît de nouveau présent dans la vie de l'Eglise; un culte qui rentre désormais à la maison et devient par là même le refuge et la consolation des humbles. La dévotion mariale quotidienne revêt aujourd'hui, dans la Paroisse de Kutu toute sa dimension ecclésiologique de prière dans l'Eglise et en Eglise: lieu d'intercession et d'espérance, de fraternisation et de communion, de partage et de solidarité avec les faibles, les étrangers, les souffrants et les malades. C'est, en effet, la redécouverte de Marie, Mère au cœur de la vie de l'Eglise. Mère aussi présente à Kutu qu'à Cana, en Galilée. Pour sa maternelle intercession, l'Eglise de son Divin Fils nous apparaît, de nouveau, comme le mystère de communion, entendue au sens de "sacrement d'unité": instrument et signe visible de l'union intime avec Dieu et d l'unité du genre humain (Lumen Gentium 1,1).

03. La Dévotion mariale au Diocèse d'Inongo

La présence maternelle de la Vierge Marie renouvelle l'Eglise dans son aspect d'Eglise Famille, Eglise Fraternité. la prière n'est plus seulement un acte rituel, une heure de dévotion, mais plus profondément le moment favorable de la communion, du sentir ensemble, de la re-naissance; on est de nouveau à quelque chose de neuf pour davantage se mettre au service des autres.Comme à Kutu, une heure de rosaire, c'est un grand moment pour la confrérie du "Saint Rosaire": enseignement, partage d'Evangile, résolutions personnelles, options pastorales d'ensemble, réconfort pour les accablés, affermissement des membres..., bref, c’est le mystère d'une Eglise qui naît de nouveau.Le Culte marial, au Diocèse d’Inongo, est sans nul doute un aspect très important dans la vie et l’apostolat de nos Communautés paroissiales, dans les Communautés sacerdotales et/ou religieuses ainsi que dans beaucoup de gourpes ou mouvements apostoliques. La dévotion quotidienne, en groupe ou individuel, est un fait on ne peut plus monnaie courante ici chez nous. Dans nos Paroisses, après l’Eucharistie matinale, un temps de louange et d’acclamation est toujours réservé après la messe à Notre Dame du Ciel. On chante le « Catena » et le « magnificat » . Chaque Communauté a son horaire hebdomadaire : soit tous les jours pairs ou impairs. A la paroisse de Kutu, même le Dimanche, après la messe dominicale, on a acquis l’habitude, donc, la Tradition de se rassembler devant la grotte, comme Elisabeth, pour proclamer « bienheureuse Celle qui a cru… » (Cfr Lc 2,45).Dans beaucoup de nos paroisses, il faut dire, la Légion de Marie est un indice incontestable de dynamisme et de vitalité dans l’apostolat. Nous ne connaissons pas de Paroisse sans Légion de Marie. Ce groupe apostolique est omniprésent même dans les Communautés reculées de l’intérieur. Sous leur impulsion, même certains villages de l’intérieur ont ressenti la nécessité de construire leur grotte, telles à Bosobe et à Bukutu dans la Paroisse Notre Dame d’Assomption à Taketa. Dans de grands Cités, comme Inongo, Nioki, Kutu, Oshwe, Mushie, Bokoro ou Kiri, la Légion de Marie est un rempart contre l’individualisme, l’isolement, l’exclusion ou même certaines coutumes rétrogrades comme la sorcellerie, le fétichisme, les brimades pratiquées à l’endroit des veuves et des orphelins lors des deuils, l’idolâtrie de la tribu, de l’argent ou de la prostitution, ou simplement contre notre propre aveuglement . Bref, la Légion de Marie ainsi que les nouvelles formes de dévotion mariale, dont essentiellement le "Mouvement Sacerdotal Marial", la "Confrérie du Saint Rosaire" sont un indice de l'éveil religieux dans nos jeunes Eglises d'Afrique et en même temps qu'un chemin d'espérance pour toute l'Eglise universelle toute entière engagée dans la" Nouvelle Evangélisation".

04. Conclusion

En guise de conclusion, nous ne pouvons que recommander aux Curés et autres aumôniers de groupes dévotionnels de considérer comme un ferment dans leur ministère l’engagement sans compter de tant de mamans, des papas et de jeunes gens et jeunes filles dans de groupes de dévotion mariale. Il est important de dire que le Culte marial n’est pas le tout de l’apostolat dans l’Eglise. Toutefois tout apostolat qui ne laisse aucune place à la louange mariale, devient du coup suspect. C’est le point névralgique des sectes et de soi-disant mouvements d’éveil religieux. Leur contestation du culte marial va souvent de pair avec leur insubordination face à l’Autorité hiérarchique.Pour le Pape Jean-Paul II, " une prière aussi facile et en même temps riche (que le Rosaire), mérite d'être redécouverte par la communauté chrétienne" ( Cfr Lettre apostolique, "Rosarium Virginis Mariae, 43 ). La Vierge Marie est le chemin qui nous mène à Jésus. Comme aux Noces de Cana, elle introduit tout disciple du Christ au dynamisme de la foi : « Quoiqu’il vous dise, faites-le » (Cfr Jn 2,5). La foi ne nous est jamais un acquis. Il nous faut grandir dans notre foi, dans l’intimité avec le Maître. Tout comme pour les disciples d'Emmaüs, c'est en pénétrant plus dans l'"intelligence des Ecritures" et au moment de la " Fraction du Pain " que nous découvrons le Ressuscité, présent parmi nous. Rappelons-nous de la réponse du Christ à Simon-Pierre: " J'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point; et toi, lorsque tu seras revenu, affermis tes frères" (Cfr Lc 22, 23). Mère des confidences divines, la Sainte Vierge Marie nous introduit dans le mystère de son Fils.

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